Simon HantaïSans titre
1963
Huile sur toile
Signée et datée en bas à droite
28 x 22.5 cm ZoomDemande d'informations - Sans titre, 1963
Provenance
Collection Privée, Belgique
Collection Privée, Belgique
Description de l'œuvre
Cette œuvre, réalisée en 1963 par Simon Hantaï, s'inscrit dans la série des "Petites touches et écritures", couvrant la période de 1958 à 1963.
À partir de 1954, Hantaï s'éloigne progressivement de l'influence surréaliste et gestuelle qui caractérisait ses débuts, ainsi que des figures majeures telles qu'André Breton et Georges Mathieu. Pour créer cette œuvre, Hantaï a eu recours à un "outil-réveil" confectionné à partir d'un vieux réveil, qu'il utilisait pour gratter la surface de la peinture jusqu'à faire émerger des formes oblongues irisées. Cette technique, qu'il désignait sous le nom de "petites touches réveil", a été développée par Hantaï vers la fin de 1958 à travers un processus expérimental. Les motifs ainsi créés se déploient de manière organique au sein de la composition, évoquant la dynamique fluide observée dans d'autres œuvres emblématiques de l'artiste, telles que "À Galla Placidia", datant de 1958-59.
Biographie de L'artiste
Simon Hantaï, figure éminente de l'abstraction gestuelle et du pliage pictural, constitue une référence incontournable dans le paysage artistique du 20e siècle.
Né en 1922 à Bia, en Hongrie, son parcours artistique se forge dans une quête incessante de nouvelles formes d'expression, façonné par ses années d'études à l'École des Beaux-Arts de Budapest et son installation ultérieure à Paris en 1948.
Dans la capitale française, Hantaï s'immerge dans le bouillonnement artistique de l'époque, puisant son inspiration auprès des surréalistes et des artistes gestuels renommés.
En décembre 1952, à l'aube de ses 30 ans, Simon Hantaï dépose anonymement devant la porte de l'appartement d'André Breton un tableau sur lequel est inscrit à l'intention de ce dernier : " Regarde dans mes yeux. Je te cherche. Ne me chasse pas ". Peu après, il apprend que Breton a ouvert sa galerie, l'Étoile scellée, où son œuvre se retrouve en vitrine aux côtés d'un tirage de feuille de vigne femelle de Marcel Duchamp.
Lorsque Breton interroge Hantaï sur son identité, ce dernier répond avec simplicité : " Je suis l'auteur de ce tableau que j'ai déposé à votre porte ".
Cette rencontre fortuite déclenche une relation amicale entre les deux hommes et propulse Hantaï au cœur du cercle surréaliste parisien, où il se lance dans l'expérimentation de différentes techniques telles que le collage, le grattage et le découpage. Ses recherches aboutissent à la création d'œuvres saisissantes, peuplées de corps hybrides et de formes étranges, où chaque élément semble revêtir une signification profonde, voire ésotérique. Les relations avec Breton et le groupe surréaliste se sont rapidement tendues, voire rompues. Simon avait exprimé en 1954 que la peinture automatique, telle que pratiquée par Pollock et les Américains, était la vraie nouveauté, contrairement à " la fixation en trompe-l'œil des images du rêve ". Breton et le groupe surréaliste n'étaient pas d'accord avec cette vision.
Quand le 11 mars 1955, Hantaï rompt avec André Breton dans une lettre qui reste néanmoins respectueuse et amicale, sa peinture l'a déjà conduit, avec une étonnante fermeté, loin du Surréalisme.
L'année 1960 marque un tournant décisif dans la carrière de Hantaï avec l'introduction du "pliage comme méthode". Cette innovation, devenue emblématique de son œuvre, transcende les limites de la peinture traditionnelle en conférant à la toile une dimension sculpturale unique. Consistant à froisser la toile de manière aléatoire avant d'appliquer la peinture uniquement sur les parties accessibles. Le dépliage révèle alors des reliefs et des creux inattendus mais surtout des zones non peintes qui prendront une place " active " de plus en plus importante dans les toiles des différentes séries qu'il développera par la suite tout au long de sa vie.
Par le biais du pliage, Hantaï laisse le hasard guider son processus créatif, révélant ainsi des compositions d'une beauté troublante et d'une profondeur inattendue.
Sa première série, intitulée "Mariales et Manteaux de la Vierge", rend hommage aux représentations de la Madone en majesté, notamment à travers la célèbre "Maestà di Ognissanti", de Giotto que Hantaï découvre à Florence en 1948 et dont le manteau bleu-noir intense a profondément marqué sa vision artistique.
Au fil des années, Hantaï décline sa méthode à travers plusieurs séries emblématiques. Les "Catamurons", du nom d'une maison de vacances à Varengeville-sur-Mer, se présentent comme des compositions sombres inscrites dans des carrés clairs, créant un contraste saisissant.
Les " Panses ", initialement intitulées " Maman ! Maman ! Dits : la Saucisse ", en référence à un texte de Michaux, témoignent de l'humour et de la subversion de l'artiste, explorant la forme de cellule tout en questionnant les frontières entre peinture et sculpture.
Les " Études ", initiées en 1968, marquent un tournant radical dans son travail, avec des pliages en all-over et une peinture monochrome appliquée bord à bord, rompant avec la logique des pliages antérieurs centrés sur un motif.
Les " Aquarelles " et les " Blancs " offrent des explorations plus expérimentales du médium et de la technique, tandis que la série emblématique des " Tabulas " joue avec les rythmes et les espaces pour créer une dynamique entre pleins et vides, offrant une profonde réflexion sur la matérialité de la peinture.
Comme le souligne Daniel Buren, qui rencontre Hantaï en 1961, il plie et peint "à l'aveugle", laissant volontairement faire le hasard. "Il ne sait absolument jamais, après avoir manipulé sa toile pliée, ce qui va se produire au dépli". C'est cette dimension imprévisible et fascinante qui confère à l'œuvre de Hantaï sa singularité et sa beauté.
L'œuvre de Simon Hantaï a été largement célébrée à travers des rétrospectives marquantes, notamment au Centre Pompidou en 2013 et à la Fondation Louis Vuitton en 2022, à l'occasion du centenaire de sa naissance. Toute sa vie, Simon Hantaï a été soutenu par Jean Fournier et sa galerie éponyme. Depuis 2019, la galerie américaine Gagosian représente sa succession et a organisé de nombreuses expositions en l'honneur du peintre notamment à Paris, New York et Rome.