Gérard Schneider

Gérard Schneider

Gérard Schneider naît à Sainte-Croix, en Suisse, en 1896, et passe son enfance à Neuchâtel, où son père exerce les métiers d'ébéniste et d'antiquaire. À l'âge de 20 ans, il se rend à Paris pour étudier à l'École nationale des arts décoratifs, puis entre en 1918 à l'École nationale des beaux-arts de Paris, dans l'atelier de Fernand Cormon, qui a été le professeur, entre autres, de Vincent van Gogh et Henri de Toulouse-Lautrec.
En 1922, il s'installe définitivement à Paris. Les années 1920 et 1930 sont pour lui une période d'apprentissage des techniques et de l'histoire de la peinture.
En 1926, il expose pour la première fois au Salon d'Automne avec son envoi "L'Allée hippique". Il fréquente le milieu musical parisien et expose cinq toiles, dont "Figures dans un jardin", au Salon des Surindépendants de 1936, des œuvres appréciées par le critique de La Revue Moderne pour leur "style et des figures d'une telle agilité que l'expression du mouvement est comme incluse dans la touche rapide".

Pendant les années 1930, Schneider découvre les mouvements artistiques de ce siècle de bouleversements et de tragédies. Au milieu de cette décennie, il assimile la révolution initiée par l'abstraction de Kandinsky, tout en explorant les nouveaux horizons apportés par le surréalisme. Il ne peint plus d'après nature. Sa palette s'assombrit, le noir y prend une place importante et y joue un rôle structurant. Il écrit des poèmes et fréquente le milieu surréaliste : Luis Fernandez, Oscar Dominguez, Paul Éluard et Georges Hugnet.

À partir de 1938, les titres des œuvres de Schneider ne font plus référence au réel. En 1939, il rencontre Picasso. Vers 1944, sa peinture abandonne définitivement toute référence au réel. En 1945, le Musée national d'Art moderne achète une toile de Schneider ("Composition", 1944).

Dans l'effervescence de l'immédiat après-guerre, l'art de Gérard Schneider joue un rôle pionnier dans la naissance d'une abstraction nouvelle. Celle-ci prend forme et s'impose dans une Europe en reconstruction. À Paris, Schneider et d'autres précurseurs proposent un retour à la radicalité de l'abstraction, une abstraction n'ayant plus aucun lien avec le monde réel et perceptible. Une abstraction qui fera date, en totale adéquation avec les impératifs esthétiques de cette époque charnière : on l'appelle l'Abstraction lyrique.
Aux côtés d'artistes comme Jean-Michel Atlan, André Lanskoy, Georges Mathieu, et surtout Hans Hartung et Pierre Soulages, avec lesquels il entretient une amitié sincère, Gérard Schneider voit son œuvre acquérir une dimension internationale.
Dès le milieu des années 1940, de grandes expositions regroupant les principaux membres de l'abstraction lyrique sont organisées à Paris, notamment dans les galeries Lydia Conti et Denise René.
À l'étranger, lors d'importantes expositions itinérantes, le public découvre cet élan créatif : à travers l'Allemagne dès la fin des années 1940, puis aux États-Unis. De 1955 à 1961, la Samuel Kootz Gallery à New York devient son marchand exclusif aux États-Unis et son étendard outre-Atlantique. Le peintre rejoint ainsi son ami Pierre Soulages au sein de cette prestigieuse galerie. La Phillips Gallery de Washington achète l'Opus 445 de 1950 et le MoMA de New York acquiert l'Opus 95 B de 1955.
En 1956, Gérard Schneider épouse en secondes noces Loïs Frederick, une jeune américaine venue à Paris faire des études d'art grâce à la bourse Fulbright, qu'il rencontre par l'intermédiaire de Marcel Brion. Les expositions de Schneider s'enchaînent à travers le monde. Il participe à la Biennale de Venise, au Prix Lissone, à l'Exposition internationale d'Art à Tokyo, à la Biennale de São Paulo, et aux deux premières éditions de la Documenta de Cassel.
Pendant les années 1960, Schneider entretient des liens étroits avec le marchand milanais Bruno Lorenzelli qui lui consacre de nombreuses expositions à travers l'Italie. Sa peinture prend une direction plus colorée, plus libérée, dans laquelle le geste acquiert une dimension définitivement calligraphique.
Lors de la Biennale de Venise de 1966, une salle entière du Pavillon français lui est réservée. De même, une grande rétrospective lui est consacrée à Turin en 1970, où une centaine de tableaux sont exposés à la Galleria Civica d'Arte Moderna. C'est un franc succès, puis l'exposition se poursuit au Pavillon « Terre des Hommes » à Montréal.

À plus de 70 ans, la créativité de Gérard Schneider reste aussi intense que jamais. Il continue à exposer fréquemment, notamment avec la Galerie Beaubourg à Paris. Sa fougue et son énergie se reflètent dans ses œuvres, exécutées avec une rapidité et une intensité qui caractérisent son style. Au tournant des années 1980, il se tourne presque exclusivement vers le papier. Il laisse derrière lui une œuvre à la fois complexe et humaine, une exploration presque insondable de la couleur et du geste.

Gérard Schneider décède le 8 juillet 1986, à l'âge de 90 ans. En 1998, Michel Ragon lui consacre une importante monographie.